Albert Ondo Ossa, figure de l’opposition gabonaise et ancien candidat à l’élection présidentielle, semble opérer un tournant stratégique dans ses relations avec le régime de Transition dirigé par le général Brice Clotaire Oligui Nguema. Après s’être éloigné des militaires au pouvoir, celui que les Gabonais surnomment affectueusement « A2O » semble désormais réévaluer sa posture politique.
Dans les premiers jours qui ont suivi le coup d’État militaire du 30 août 2023, Albert Ondo Ossa affichait une certaine proximité avec le Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI). Le général Oligui Nguema s’était même rendu à son domicile peu après le renversement d’Ali Bongo Ondimba, marquant un moment de concorde. Les deux hommes avaient scellé publiquement cette entente en décembre 2023 lors du lancement des travaux de construction de l’axe Oyem-Assock Medzeng.
Cependant, cet épisode marquait la dernière démonstration publique de complicité entre les deux hommes. Par la suite, Ondo Ossa s’est éloigné, aiguisant son discours pour dénoncer ce qu’il qualifie de « vol de sa victoire » à l’élection présidentielle par les militaires. Devenu l’un des principaux détracteurs de la Transition, il a notamment appelé à voter contre le projet de Constitution lors du référendum du 16 novembre 2024.
Jeudi dernier, Albert Ondo Ossa s’est rendu au palais présidentiel pour une rencontre en tête-à-tête avec le général Oligui Nguema. Ce geste, interprété comme un possible changement de cap, pourrait marquer une révision de sa stratégie. Ce retour au dialogue survient dans un contexte où la nouvelle Constitution limite sévèrement ses perspectives politiques : en fixant l’âge des candidats à la présidentielle entre 35 et 70 ans, le texte adopté le 16 novembre 2024 disqualifie Ondo Ossa, qui aura 71 ans en 2025.
Cette restriction réduit considérablement ses ambitions nationales, mais elle ne semble pas avoir éteint son instinct de tacticien.
Albert Ondo Ossa n’en est pas à sa première manœuvre stratégique. En 2022, alors que l’élection présidentielle de 2023 se profilait, il avait surpris la classe politique en annonçant publiquement sa « candidature à la candidature », se plaçant comme un potentiel champion de l’opposition. Malgré des statistiques peu en sa faveur, il avait finalement remporté cette bataille politique, évinçant des figures majeures comme Alexandre Barro Chambrier, Paulette Missambo et Raymond Ndong Sima.
Aujourd’hui, certains se demandent si cette récente visite au palais présidentiel ne traduit pas une tentative de repositionnement similaire. Dans un contexte de Transition où le « mercato politique » est en plein essor, Ondo Ossa pourrait chercher à regagner une influence, même dans un cadre institutionnel qui semble le désavantager.
Albert Ondo Ossa reste un acteur incontournable de la scène politique gabonaise, un intellectuel dont les analyses et les manœuvres stratégiques continuent de susciter l’attention. Son avenir politique, bien que contraint par les nouvelles règles institutionnelles, demeure incertain. Sa récente rencontre avec le président de la Transition pourrait indiquer qu’il prépare un nouveau chapitre dans son parcours.
Pour l’heure, une question persiste : Albert Ondo Ossa joue-t-il une dernière carte dans le grand jeu de la Transition, ou cherche-t-il simplement à préserver son influence dans un paysage politique en pleine mutation ?