Dans une décision aux allures de tournant stratégique, le gouvernement gabonais a annoncé, lors du Conseil des ministres du vendredi 30 mai 2025, l’interdiction de l’importation du poulet de chair à compter du 1er janvier 2027. Cette mesure, adoptée sous la présidence du chef de l’État Brice Clotaire Oligui Nguema, s’inscrit dans une politique de relance de la production agricole nationale et de sécurisation de l’alimentation des populations.
18 mois pour s’organiser et investir
Le délai de mise en œuvre, fixé à 18 mois, a pour but de permettre aux acteurs de la filière avicole éleveurs, investisseurs, commerçants, transformateurs — de se préparer à répondre à la demande intérieure sans le recours aux importations. Une période jugée nécessaire pour amorcer une réorganisation du secteur et mobiliser les investissements adéquats.
Le gouvernement espère ainsi stimuler la production locale, réduire la dépendance alimentaire, renforcer la balance commerciale, et favoriser l’émergence d’un tissu d’emplois ruraux. À travers cette décision, Libreville entend également améliorer la qualité des produits consommés localement et structurer un écosystème économique viable autour de l’aviculture.
Un plan opérationnel en cours d’élaboration
Afin d’accompagner cette transition ambitieuse, un plan opérationnel détaillé est en cours d’élaboration. Les ministres en charge de l’Économie et du Commerce ont 45 jours pour le présenter officiellement. Ce plan devra établir les conditions d’accompagnement, les incitations à l’investissement et les mécanismes de suivi de la filière avicole.
La fin annoncée de « la star du congélateur »
Le poulet surgelé importé, surnommé affectueusement « la star du congélateur » par les Gabonais, est actuellement l’un des produits les plus consommés dans les foyers, en raison de son prix abordable, de sa disponibilité constante et de sa facilité de préparation. Généralement importé d’Amérique latine et d’Europe, ce produit a largement contribué à affaiblir la production avicole nationale.
Son interdiction devrait rebattre les cartes d’un marché historiquement dominé par les importations et offrir de nouvelles perspectives aux producteurs locaux, tout en améliorant la traçabilité et la qualité sanitaire des produits proposés à la population.
Une autre filière stratégique visée : le manganèse
Par ailleurs, le Conseil des ministres a également décidé d’interdire l’exportation de manganèse brut à partir du 1er janvier 2029, en vue de favoriser sa transformation locale. Le Gabon, deuxième producteur mondial de cette ressource stratégique, veut ainsi accroître la valeur ajoutée de ses exportations, soutenir le développement industriel, et créer davantage d’emplois qualifiés sur son territoire.
Avec ces annonces, le Gabon amorce une nouvelle phase de réappropriation de ses ressources agricoles et minières, dans une logique de souveraineté économique et de développement durable. Un pari audacieux, qui repose désormais sur la capacité des acteurs nationaux à relever le défi de la transformation locale.