Dans un témoignage à la fois saisissant et inédit, diffusé le lundi 4 août 2025 sur TV5 Monde, Brice Laccruche Alihanga, ancien directeur de cabinet du président Ali Bongo Ondimba, est revenu pour la première fois sur l’épisode qui, selon lui, a marqué sa chute brutale du sommet de l’État. Un moment charnière, raconté avec une précision glaçante, qui éclaire d’un jour nouveau les luttes intestines ayant précédé sa spectaculaire arrestation en novembre 2019.
Au cœur de ce récit, une scène aussi courte que lourde de sens : une convocation en tête-à-tête à la résidence de Noureddin Bongo Valentin, fils du président Ali Bongo et petit-fils du président Omar Bongo. Là, dans l’intimité du pouvoir, un projet de succession dynastique lui aurait été proposé, presque imposé.
« Nourreddin Bongo m’a dit : Mon grand-père était président, mon père est président, je serai président. Es-tu avec moi ou contre moi ? », rapporte Brice Laccruche Alihanga.
Ce moment de vérité, l’ancien homme fort du régime le qualifie de tournant fatal. Refusant de cautionner ce qu’il considère comme une « dérive monarchique », il affirme avoir répondu sans détour :
« J’ai dit non au prince qui voulait devenir roi. J’ai signé mon arrêt de mort. »
Ce refus catégorique, Brice Laccruche en est convaincu, a marqué le début d’une descente aux enfers savamment orchestrée. Quelques semaines plus tard, il était interpellé dans le cadre de l’opération « Scorpion », accusé de corruption et placé en détention. Mais pour lui, les véritables motifs de son arrestation sont ailleurs.
« Ce n’était pas une affaire judiciaire. C’était une exécution politique déguisée », martèle-t-il.
Il va plus loin encore, affirmant avoir été victime d’une tentative d’assassinat. « C’était une mise en œuvre organisée, planifiée, qui visait à m’éliminer physiquement », déclare-t-il avec gravité.
Jusqu’ici présenté comme un collaborateur déchu, emporté par ses propres ambitions ou par des dérives financières, Brice Laccruche Alihanga se redessine en opposant interne à une succession dynastique. Son récit bouleverse le narratif officiel. Il évoque un système verrouillé, où le refus de se soumettre à une logique héréditaire équivalait à une condamnation.
« Je ne voulais pas servir un pouvoir personnel, illégitime et héréditaire », insiste-t-il.
Son témoignage jette une lumière crue sur les derniers soubresauts du régime Bongo avant le coup d’État du 30 août 2023. Il remet en question l’indépendance des institutions et révèle les tensions souterraines d’un système qui semblait inébranlable.
En rompant le silence, Brice Laccruche Alihanga se réinscrit dans le paysage politique comme témoin central d’une époque trouble. Il ne revendique ni vengeance ni réhabilitation immédiate, mais affirme une volonté claire : livrer sa vérité, pièce par pièce.
« J’ai tout perdu, mais je n’ai pas perdu ma parole », conclut-il.
Ce témoignage pourrait bien constituer la première secousse d’un nouveau cycle politique au Gabon. Reste à savoir si cette parole retrouvée sera entendue et suivie d’effets.