À la tribune des Nations Unies, Brice Clotaire Oligui Nguema a livré un discours sans ambages qui illustre le positionnement d’un Gabon en reconstruction et d’une Afrique décidée à peser sur la scène internationale. Le président gabonais, à la tête du pays depuis la transition ouverte après le 30 août 2023, a articulé son propos autour de quatre axes majeurs : démocratie, souveraineté économique, justice climatique et réforme de la gouvernance mondiale.
Devant l’Assemblée générale, Oligui Nguema a ouvert son intervention par un rappel des étapes-clés de la transition gabonaise : la rupture du 30 août 2023, son investiture le 3 mai 2025 comme premier président de la Cinquième République, et l’organisation prochaine d’élections législatives, locales et sénatoriales en novembre.
Cette séquence politique, présentée comme un retour ordonné à l’État de droit, a reçu un accueil favorable de plusieurs partenaires internationaux, soucieux de stabilité dans le golfe de Guinée.
En inscrivant son récit national dans le cadre de l’ONU, Oligui Nguema a cherché à légitimer la transition auprès de la communauté internationale. Ce rappel vise aussi à rassurer sur la tenue d’élections libres et à replacer le Gabon comme un État respectueux de ses engagements démocratiques, un point essentiel pour attirer des investisseurs et regagner la confiance des bailleurs multilatéraux.
Le chef de l’État a tenu des propos fermes sur la dépendance structurelle des économies africaines vis-à-vis des puissances extérieures. « Nous avons choisi de transformer nos ressources sur place, de créer des emplois chez nous et de bâtir des filières industrielles africaines », a-t-il déclaré, dénonçant la logique d’extraction brute qui prive le continent de valeur ajoutée.
Cette prise de position traduit un changement de paradigme économique : le Gabon ambitionne de passer d’un rôle de fournisseur de matières premières à celui d’acteur industriel. Si ce discours est porteur sur le plan politique, sa concrétisation dépendra d’investissements massifs en infrastructures, en formation et en gouvernance économique. C’est aussi un message adressé aux bailleurs : le pays veut désormais des partenariats équilibrés et non plus des relations asymétriques.
Dans un ton résolument panafricain, Oligui Nguema a alerté sur les crises sécuritaires persistantes – du Sahel à la Corne de l’Afrique en passant par la RDC – et appelé à une réponse collective. Il a également réitéré le soutien du Gabon à la levée de l’embargo sur Cuba, mettant en avant une diplomatie axée sur la solidarité et le respect du droit international.
En reliant les luttes africaines et les causes globales comme Cuba, le président gabonais cherche à positionner le Gabon comme une voix morale au sein du Sud global. Cette stratégie consolide son image de médiateur et de partenaire fiable dans les questions internationales.
Le chef de l’État a insisté sur le rôle central des forêts du bassin du Congo, qualifiées de « second poumon de la planète ». Il a exigé une rémunération équitable des services écologiques rendus par ces forêts au reste du monde.
Le Gabon exploite son statut de pionnier environnemental pour obtenir un retour financier sur ses efforts de conservation. C’est une approche pragmatique : si les pays développés veulent que l’Afrique protège ses ressources naturelles, ils doivent compenser les coûts économiques liés à la non-exploitation de ces forêts.
Oligui Nguema a conclu sur la nécessité urgente de réformer le Conseil de sécurité, dénonçant l’exclusion persistante du continent africain des instances de décision majeures et appelant à un multilatéralisme plus représentatif.
Cette revendication, déjà ancienne, gagne en force à mesure que l’Afrique revendique sa place dans l’économie mondiale et la gestion des crises globales. En l’évoquant au plus haut niveau, le président gabonais se positionne comme un porte-voix d’une Afrique qui réclame un siège à la table des grandes décisions.
Avec ce discours, Brice Clotaire Oligui Nguema a voulu envoyer un double message : le Gabon est de retour sur la scène internationale et il entend y parler au nom d’une Afrique qui refuse la marginalisation.
Cependant, au-delà des intentions, le défi sera de traduire ces engagements en actes tangibles : réformes internes, diversification économique et consolidation des institutions démocratiques. La crédibilité de ce leadership africain émergent dépendra des résultats concrets obtenus dans les mois à venir.