L’ancien Premier ministre gabonais, Alain-Claude Bilie-By-Nze, président du mouvement Ensemble pour le Gabon (EPG), a vivement dénoncé, ce mardi 9 décembre à Libreville, la mise en place de la Taxe forfaitaire d’habitation (TFH). Au cours d’une conférence de presse, l’opposant a qualifié cette nouvelle imposition d’injuste et inadaptée, l’inscrivant dans ce qu’il considère comme un contexte de « matraquage fiscal généralisé » contre des ménages déjà durement éprouvés.
Intervenant au lendemain de l’annonce officielle du gouvernement, Alain-Claude Bilie-By-Nze a estimé que la TFH vient s’ajouter à une série de charges nouvelles, telles que la taxe carbone ou encore la contribution sur les communications et télécommunications. Pour lui, cette accumulation traduit une offensive fiscale globale qui pèse excessivement sur les citoyens, notamment les retraités, les chômeurs et les travailleurs aux revenus modestes. « Cette taxe intervient dans un environnement économique déjà très contraignant pour les Gabonais », a-t-il déclaré.
L’ancien chef du gouvernement a particulièrement critiqué la philosophie même de la TFH, qu’il assimile à un « bouclier fiscal » mal conçu et déconnecté des réalités sociales. Selon lui, le choix de l’électricité comme base de prélèvement est problématique, dans la mesure où il s’agit d’un bien de première nécessité. Il a également dénoncé les critères géographiques retenus pour la fixation des montants, qu’il juge incohérents et sources d’injustices.
Illustrant son propos par un exemple concret, Alain-Claude Bilie-By-Nze a expliqué qu’à Angondjé, un veilleur de nuit est appelé à payer le même montant que des personnes au niveau de vie bien plus élevé, tandis que dans d’autres quartiers, comme Awendjé, certains ménages s’acquittent de montants bien supérieurs malgré des revenus plus faibles. Une situation qu’il qualifie d’« aberration sociale ».
S’appuyant sur un rapport de la Banque mondiale de 2024, qui indique que plus d’un tiers des Gabonais vivent sous le seuil de la pauvreté, l’ancien Premier ministre a accusé les autorités de faire l’impasse sur les véritables priorités nationales. Il estime que le gouvernement choisit la facilité en taxant les ménages, plutôt que de s’attaquer à des enjeux structurels tels que l’emploi des jeunes, la lutte contre la corruption ou l’amélioration de la gouvernance publique. « Les taxes sont imposées quand on ne sait plus gouverner », a-t-il lancé.
Sur la question foncière, Alain-Claude Bilie-By-Nze a insisté sur la nécessité d’une organisation préalable avant toute mise en œuvre crédible d’une taxe d’habitation. Selon lui, l’absence de titres fonciers clairement établis, le manque de prise en compte de la qualité de l’habitat, du niveau d’urbanisation et de l’accès aux services publics rendent cette taxe prématurée et inéquitable.
Face à ce qu’il qualifie de taxe « inutile et injuste », le président d’Ensemble pour le Gabon a appelé à la désobéissance civile et surtout à une mobilisation large des partis politiques d’opposition, des syndicats, des travailleurs des secteurs public et privé, ainsi que de la société civile. Il exhorte ces différents acteurs à faire front commun pour contraindre le gouvernement à revoir sa copie.
Alain-Claude Bilie-By-Nze a également pointé d’autres sources de recettes potentielles insuffisamment exploitées, notamment la lutte contre la corruption, la mauvaise gestion des fonds publics et l’absence de contrôle rigoureux dans les marchés publics et les industries extractives. Il a, par ailleurs, dénoncé la « taxe carbone », qu’il estime hypocrite, prédisant qu’elle finira par être répercutée sur les consommateurs, notamment à travers les prix des transports.
Adoptée en Conseil des ministres le 4 décembre dernier, la Taxe forfaitaire d’habitation doit entrer en vigueur en 2026 et sera prélevée directement sur les factures d’électricité. Si elle ne concernera pas, dans un premier temps, les zones rurales, le gouvernement assure qu’elle vise à renforcer les ressources de l’État pour soutenir la relance économique et les finances publiques.
Un argument que rejette fermement l’ancien Premier ministre, pour qui « ce qui est proposé n’est ni plus ni moins qu’une taxe sur l’électricité ». Il déplore également l’absence de base juridique claire encadrant le prélèvement d’un impôt à partir des factures d’énergie. « C’est indécent, parce qu’on ne s’attaque pas aux vrais problèmes », a-t-il conclu, fustigeant l’attitude des autorités.
Dans un climat déjà marqué par des tensions sociales latentes, cette prise de position annonce une montée en puissance de la contestation politique et citoyenne autour de la réforme fiscale, à l’approche de son entrée en vigueur.



