Transport urbain au Gabon : Taxi Gab+ face à l’indiscipline des conducteurs, un miroir d’une crise culturelle plus large

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Dans une interview parue dans L’Union (n°14823, mardi 13 mai 2025), Curt Myricks Fouty Obeye, directeur général de Taxi Gab+, a levé le voile sur les dysfonctionnements profonds qui minent la gestion du transport urbain au Gabon. Un témoignage lucide, parfois amer, qui met en lumière l’ampleur des résistances culturelles et du manque de civisme dans un secteur pourtant vital pour la mobilité urbaine.

Une discipline en lambeaux malgré les injonctions

Le point de départ de cette dénonciation : le stationnement anarchique des conducteurs devant les débits de boissons. Malgré des consignes claires, ces pratiques persistent, au mépris des règles et de l’image de l’entreprise. « J’ai fait une note dans laquelle j’ai interdit aux chauffeurs de se garer devant les bars. Vous savez ce qu’ils m’ont répondu ? « Nous sommes en partenariat, et tout le monde sait que le Gabonais doit toujours boire sa bière », » relate Curt Myricks Fouty Obeye, visiblement excédé.

Une réponse qui en dit long : le respect de l’autorité est ouvertement défié, et la normalisation de comportements à risque est presque assumée. Cette situation reflète une indiscipline systémique dans le secteur des transports, au point que Taxi Gab+ détient aujourd’hui, selon son DG, le record de contraventions pour stationnement illicite.

Une crise de gouvernance… et de culture

Derrière l’insubordination des chauffeurs se cache une réalité plus inquiétante : la banalisation de l’alcool au volant et un rapport permissif à la loi. La culture de l’impunité semble enracinée, rendant les mesures disciplinaires internes quasi inefficaces. Ce constat s’oppose frontalement à la volonté du gouvernement de la Vᵉ République de restaurer l’ordre public et de moderniser les services publics.

Alors que Taxi Gab+ ambitionne de devenir la vitrine de la nationalisation et de la professionnalisation du transport public à Libreville, ce laisser-aller ternit non seulement son image, mais interroge aussi sur la capacité du système actuel à faire respecter les normes de sécurité.

Quelle réponse institutionnelle ?

Le cas Taxi Gab+ apparaît comme un signal d’alarme pour les autorités. Face à l’indiscipline structurelle, des solutions plus fermes s’imposent :

  • Renforcement de la coopération entre la direction générale de la Sécurité routière, les forces de l’ordre et les compagnies d’assurances ;

  • Imposition de malus financiers pour les conducteurs récidivistes ;

  • Suspension ou retrait de licence pour les comportements à risque répétés ;

  • Campagnes de sensibilisation couplées à une réforme de la formation des conducteurs.

Une mission de rigueur pour Ulrich Manfoumbi-Manfoumbi

La balle est désormais dans le camp du nouveau ministre des Transports, Ulrich Manfoumbi-Manfoumbi, qui devra imprimer une ligne de fermeté et de transformation dans un secteur gangrené par les habitudes néfastes. Entre réforme structurelle et rééducation citoyenne, la tâche s’annonce difficile, mais nécessaire.

Au-delà de la gestion quotidienne des transports, c’est une question de sécurité publique, de civisme et d’identité républicaine qui se joue. Le défi est immense : faire du transport urbain un espace de discipline, de service et de respect de la norme, à l’image d’un État moderne et rigoureux.

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